dimanche 30 novembre 2014

Anna, ma soeur Anna




Plus les années passent plus je prends l'habitude de repousser mes projets les uns après les autres. Ils deviennent avec le temps si nombreux et si encombrants qu'ils ne tiennent plus dans mon cerveau et finissent par envahir mon salon, ma chambre ou mon bureau. Ainsi je les retrouve tous les matins gisants comme de jolis bébés abandonnés. Je ne les regarde même pas. Je ne les écoute pas.  Je ne les aime pas.

Et pourtant, hier, de toutes mes missions urgentes restées sans maman j'ai fini par en prendre une dans mes bras. Je l'ai regardée dans les yeux et elle m'a souri avec douceur comme pour me dire délicatement qu'elle me pardonnait. Ainsi j'ai pris ou repris un projet qui me tient à cœur, un peu trop imposant peut-être, ce qui explique mon intimidation devant la tache.

500 pages environ de correspondance. Deux interlocuteurs qui s’écrivent des mails sur le conflit israelo-palestinien à partir de 2002.  Un témoignage, un documentaire mais aussi une histoire. L'histoire d'une amitié plus immense que tous les continents, une amitié profonde et inébranlable entre deux personnes que tout oppose.

Pendant les trois années passées depuis le décès de Jean Claude j'ai cherché des solutions pour pouvoir reproduire ce chemin marché ensemble en lui restant fidèle d'une part mais aussi en engendrant un texte fictionnel, un roman et non un documentaire, même s'il demeure un roman épistolaire.

Finalement, la nuit dernière vers 1h du matin, j'ai compris que le roman existait déjà. Il me suffisait de le continuer. L'histoire d'Anna dans "Anna R. Licht" se situait sur une semaine du mois de mars  1975 à Paris. J'avais bien ecrit quelques chapitres de la suite d"Anna R.Licht" qui s'appelait "Fractures" et se situait en 2005 en Israël mais je me suis arrêtée, trop angoissée par ce projet. Ainsi mon interlocutrice féminine dans mon roman épistolaire sera  Anna telle que je l'avais conçue pour "Fractures".

Anna était donc l'héroïne du roman "Anna R. Licht" qui se situait en 1975 à Paris. Vingt-sept ans et cinq enfants plus tard, Anna  habite en Israël. Totalement ancrée dans un système religieux à tendance droite et même extrême droite, elle a ses propres préférences politiques qu'elle ne cache pas. Anna entretient des liens tout aussi étroits que mystérieux avec un octogénaire, un médecin tourné activiste en Amérique du sud puis en Palestine: le docteur Michel Rousseau.
 
Anna est mariée à Daniel Lahav, un homme secret et intransigeant. Son nom, "Lahav" qui veut dire "lame" en hébreu, correspond bien à sa personnalité. Anna et Daniel se sont retrouvés en Israël en 1977. Bien que devenu très religieux et établi dans sa communauté, Daniel a gardé le côté sauvage et impulsif qui avait tant marqué Anna à Paris. Daniel cachera à ses enfants son séjour en prison en Pennsylvanie du temps ou il s'appelait encore Henri Cutter.

Voici donc mes protagonistes: Anna Lahav (née Licht) et le Dr. Michel Rousseau. Je leur demande d'avance patience et indulgence.